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Il faut matière humaine Pour faire des solitudes

Il pleut Il est à sa fenêtre Pas tout à fait Il est à sa fenêtre Assis à sa table Derrière la fenêtres A deux pas Formica vert lisse Dessous de plat dessus Tasse de café Fumant dans une main Fumant de l’autre main Il fume sur sa chaise A sa table Derrière sa fenêtre Avec sa radio Sur le meuble blanc Deux portes en bas Les assiettes les plats Deux portes en haut Vitrées, pour les verres Les tasses, à café à thé Au milieu la radio Les clés pour sortir Les mêmes pour rentrer Dans un sens dans l’autre La serrure plus loin Au milieu aussi De la porte En haut vitrée en bas bien pleine En bas sombre et bois En haut lumière la journées Opaque secrète Sans pluie Sous son abri de verre Sur ses petites ferrailles Rouillées à force Qui transpirent la rouille Fait office quand même Soutiennent le verre dessus La mousse sur le verre Il pleut dessus Il gouttière toujours Dessus l’eau puis dessous Mais pas sur la porte Pas sur la serrure Pas sur le tapis où Jours de pluie Il frotte les pieds Évite de mouiller de salir Le lino clair de la cuisine sombre Sombre surtout lorsqu’il pleut Il pleut Il fume Le café les cigarettes Fument Les fumées montent Se croisent se séparent Il aspire il avale il souffle Il regarde Dehors Derrière la vitre Les dessins de la pluie Sur la vitre Il se lève parfois Il regarde dehors Le nez à la vitre Les mains en oeillères Les sourcils froncés Pour passer la buée Comme s’il pouvait pleuvoir Sur son regard Sous son regard Et dehors il pleut Sur le jardin les allées La clôture la niche Il pleut un peu dans la niche C’est pas grave Il n’y a plus de chien Ça fait un moment qu’il n’y a plus de chien La nuit dans la niche Le jour à ses pieds Pourtant il continue A faire attention Quand il se lève il regarde Encore Toujours S’il n’est pas là le chien Encore dans ses pieds Toujours à traîner dans ses pieds mais non Il n’y est pas n’y est plus mais sa démarche ses pas Se souviennent et font attention de pas lui marcher dessus Au chien Le chien il aimait pas sortir sous la pluie Alors il sortait pas Alors il regardait la pluie Sur sa chaise A sa table Le chien à ses pieds Dans ses pieds Il pleut il sort pas il fume il attend N’attend N’attend pas Plus Que le téléphone sur le petit meuble à l’entré juste à l’entrée à droite quand on entre sonne Toujours trop fort A l’intérieur du silence Pas d’appel pas assez Et le regard pourtant Entre la fenêtre la pluie Le cadre de la porte De la cuisine d’un côté de l’entrée de l’autre Le regard balancier Entre la pluie qui empêche de sortir Et le téléphone aussi Au cas ou au cas ou il sonne on sait jamais Le bruit de la pluie le silence Du téléphone Réunis le silence et la pluie Contre lui Pas d’appel trop de pluie Pas l’inverse si seulement Avant qu’il soit froid finir le café Écraser le mégot avant que les doigts brûlent Le cendrier noir le pousser d’une main De l’autre chercher le chien Quand même Même si Dans la peau de la main les souvenirs les rituels mais rien La main sur le visage Du front au menton La main sur le visage chasse le sommeil cherche à réveiller La main sur le visage Aux alliances qui râpent Sillonnent la peau Mais ne sèment plus rien Aiment bien Toujours Mais ne touchent plus rien Plus le chien plus rien Il a gardé son alliance il porte les deux ne les enlève jamais N’a pas voulu Ne peut plus

La mélancolie Donne des illusions Au désespoir

Le jour des armoires à glace Il viendra ce jour Bien évidemment Tout le monde sera fort occupé A vider trier jeter garder Tout le monde Bien évidemment tout le monde Pas d’excuse d’exception Ceux qui dessous rampent Forcément certains le feront Certains glisseront Entre quatre pieds, Droits Courbés Ouvragés peu importe mais partout supportant Une armoire à glaces aux miroirs lourds Pesants De reflets De lumières Et d’ombres Lourds Bombés Déformants Prêts à éclater de rires visqueux Glissants Au bas aux pieds sur les quatre pieds Comme à quatre pattes Les armoires Aux fonds lourds Bombés Qui râpent le dos de ceux qui Rampent Voudraient glisser mais rampent Avec un dos courbe et le craquement d’un cafard qu’on écrase Qu’écrasent bien évidemment Les armoires à glaces Le jour des armoires à glaces Où Pas la peine de glisser Pas la peine de grimper de gravir de faire l’ascension de l’armoire montagne De l’armoire montagne aux parois si lisses De toutes les matières mais Collées Toujours évidemment A force Plaquées contre Contre un mur Chacun son armoire chacun son mur Dans sa maison Quelle que soit sa maison Quelle que soit la maison il y a toujours une armoire à glaces Contre un mur Sur quatre pieds Avec ceux qui rampent et glissent Écrasés Cafardés Et ceux qui grimpent Face avant, qu’un versant accessible Face miroir Qui sourit qui sourit pas ça dépend Face à gueules du matin Face à gueules du soir Face à l’absence de gueule Dans la journée Dans la nuit Se relève le miroir dans la nuit Face à l’absence se recouche On dit triste comme un miroir sur une armoire à glace face à l’absence Ou on devrait mais on sait pas toujours faut se lever pour voir ça Dans la nuit Face à la lune Des fois Face au trait de lune Face au trait du doigt sur la buée De la lune posée sur le miroir A travers la fenêtre Entre ouverte A travers les volets Elle se glisse pose un doigt un peu chaque jour un autre puis la main pose la main La lune En croissant Puis l’autre Affamée de reflet une main et l’autre S’approchent se touchent se ferment et pleine La lune Affamée puis repus la lune deux croissants et c’est bon tchao à la prochaine s’en va Mais reste La face ou pas De l’autre Et reste Juste Faut le voir pour le voir faut s’approcher qui se lève la nuit pour le voir qui le ferait c’est absurde La buée accrochée comme la virgule idiote d’une phrase incomplète Et Sur Sous Dans pourquoi pas sous un linge Une pile de linge le fond d’un tiroir de l’armoire qui baille la nuit un peu plus que le jour Grince toujours grince un peu plus fort la nuit Plus lourdes les glaces plus lourds les miroirs la nuit pour les charnières qui Forcent peinent hurlent non pas hurlent c’est pas ça c’est autre chose pleurent peut-être oui peut-être mais qui sait qui voudrait se lever la nuit pour écouter pour savoir si les charnières des portes vitrées des armoires à glaces hurlent Ou grincent Ou pleurent ou pleurent Qui Usées le matin les charnières Entrebâillées les portes le matin Fatiguée l’armoire on dirait toujours qu’elle penche Le matin Qu’elle s’étire ouvre un peu ses portes puis étirée les referme et Réveillée Contre le mur l’armoire Plus bailler les portes plus crier les charnières La journée les armoires à glaces gardent leurs portes fermées en serrant leurs charnières comme on sert les dents parce qu’on veut pas sourire ou qu’on veut pas montrer qu’on sourit pas alors on sert les dents comme les armoires serrent leurs portes comme on rentre la tête dans des épaules de charnières plantées de vis, tout ça c’est elles c’est elles qui permettent qui empêchent l’armoire les portes les glaces les charnières Mais des jours certains jours vaudrait mieux pas les voir vaudrait mieux rester couché mais ce sont des jours qui suivent des nuits où on s’est pas couché alors forcément c’est fatigué c’est usé que Reflets peau de tain Que grande gueule le miroir que la buée sitôt qu’on s’approche alors On regarde de loin De loin certains disent qu’ils vont grimper D’autres qu’ils vont ramper Et savent, savent en on vu tant vu tellement vu trop pour croire à une issue Et sous l’oreiller la tête dans les bras sous les bras c’est pas grimper c’est pas ramper c’est sous n’importe quoi le regard plutôt que sur l’armoire à glace surtout quand c’est le jour Des armoires à glaces Le jour où personne n’y échappe parce que c’est comme ça C’est sans explication Sans réponse et que ceux qui Ont pas voulu pas pu ont cru que ramper grimper suffirait suffisait à et bien non Seuls ceux qui auront été pris ne le seront pas Seuls ceux qui auront été pris ne le seront plus et s’appliqueront à ignorer les bruits de bouches des portes des glaces des miroirs aux dents de charnières sur les reflets qui veulent s’échapper Mais non Mais non et qui n’a pas compris que les reflets les rattraperont toujours de leurs langues de lumière Tout au long des chemins de poussière dans les rais de lumières Grimperont ramperont Pendant que d’autres déjà ayant Rampé grimpé Seront occupés à plier le linge les draps à droite les pulls à gauche dans le tiroir à glissières à gauche les sous vêtement et celui de droite les chaussettes certains s’amusent à inverser c’est drôle Si si Et en bas au fond les chaussures Celles qu’on met plus qu’on garde parce que du mariage et qui faisaient mal parce que les pieds gonflés faisait si chaud et qu’on garde en souvenir comme une boîte de dragées, sacré mariage quand même quel con ce Lucien qui aurait cru qu’un jour mais faut dire qu’il a pas tiré le gros lot c’est pas un cadeau ça a pas l’air elle non plus y en a qui ont pas dû y croire du coup bon Peut-être un jour pour un enterrement les chaussures Un hiver On enterre plus l’hiver Ça sera l’occasion de les ressortir de les cirer Elles seront trop petites un peu pas grand-chose mais trop petites c’est comme ça c’est comme ça qu’on voit que le temps passe quand on s’aperçoit que la taille des pieds n’est jamais la bonne Mais pas grave ça gêne pas dessous la boîte au fond et dessus l’autre paire d’un autre qu’on aurait pas cru aussi mais que si et que lui aussi il a sa elle aussi qu’on aurait pas cru et d’autres boîtes d’autres chaussures qui s’entassent Comme des cercueils dans un caveau familial Et Boîte un peu oubliée Un peu à l’écart Comme pour Se souvenir A chaussures sans chaussures avec Photos lettres bijoux pas en or en toc en souvenirs matière à souvenirs D’amours d’un amours des amours Les lettres ne sont que de ça Lettres de ruptures pareil D’amour de plus d’amour de pas de plus comme il faut mais si Sinon boîtes encore A papiers celles-là Contenues maintenues avec un élastique qui demande qu’à péter à claquer dans les doigts dans les souvenirs les mauvais les qu’on croyait mauvais et que là à ôter l’élastique de la boîte de la boîte blottie au fond de l’armoire à glace ben c’est que quand même ça veut bien dire quelque chose ça veut bien dire un truc c’est pas rien derrière le papier vulgaire de la banque du notaire des actes des actions des gestes des envies des dégoûts des joies des colères de la vie des passions du passé c’est précieux c’est précieux c’est au tas de boîtes au fond Sur lesquelles on été alignées les chaussures les godillots pas dans mais dessus la boîte Les chaussures pour le quotidien sous la semelle encore la cendre des mégots écrasés Cigarettes grillées Fumées Sorties du paquet fumées écrasées plus Retour au paquet à la boîte au passé L’armoire comme un cendrier qui pue c’est terrible un cendrier froid personne n’aime l’odeur personne même pas ceux qui le remplissent Mais Mais Cendrier de métal En couleurs aux couleurs au nom de quoi on sait plus trop on lit plus bien ça à du être rouge bien rouge ça l’est plus autour dedans c’est un peu écaillé la peinture si pâlie si grisée la cendre ça grise, pas que les souvenirs, puis le nom déjà c’est quoi c’est quoi à oui c’est vrai un vieil apéro c’est vrai c’est vrai même que déjà avant même quand le cendrier était bien propre bien coloré encore la marque n’existait plus déjà Remplacée déjà c’était plus quelque chose qu’on buvait c’était quelque chose dont certains se souvenaient avoir vu d’autres boire c’est comme ça les cendriers les marques dans les cendriers ça part ça s’efface restent que ceux qui en boivent de nouveaux en écrasant de nouveaux mégots sur la trace des anciens et Dans certaines armoires à glaces dans certaines boîtes à chaussures ôtés les scellés élastiques qui claquent posés les couvercles à côté doucement doucement lentement retardés le moment de plonger d’y rentrer on sait pas si on en sortira on sait pas si même froids quelque soit le souvenir le goût du souvenir sa marque ses marques la marque du tabac qu’il soit blond brun ou gris on sait pas si on va pas s’y remettre à fumer à cloper à s’en griller une à s’en griller un de mégot en tirant dessus tout en fermant les yeux ça pique la fumée selon le tabac selon la fumée et Trop tard pour s’en apercevoir c’était comme ça avant mais on avait l’habitude maintenant ça va être différent il y avait ceux qui cigarettes à filtres s’en servaient pour écraser le mégots et ceux qui cigarettes sans filtre se brûlaient les doigts C’était comme ça avant pas de raison que ça change les souvenirs sont pas faits pour ça Alors brûlés les doigts piqués les yeux on continue autre boîte autre temps plus loin encore là boîte plus profond plus d’effort encore un effort si Si Comme avant Comme avant gamins alors assez légers pour s’accrocher aux portes de l’armoire à glaces on pouvait gravir la montagne sans qu’il n’y ait d’avalanche et que tout forcément devienne une aventure ou que autre style sur la pointe des pieds des pieds sur la paille de la chaise bancale tremble la chaise tremblent les jambes d’équilibre d’impatience d’excitation parce que les gamins n’attendent jamais le jour des armoires à glaces pour regarder dessus dedans dessous n’attendent pas pour se faire des souvenirs avec ceux des autres avec en l’absence des parents de parents des plus vieux des plus vieux encore qui ont bien caché ont bien gardé secret ou pas assez on se demande on peut se demander si quand même il n’y avait pas mieux qu’une armoire à glace Dessus Dedans Dessous Pas mieux qu’un vieux meuble invendable transmis et gardé ou pas souvent pas gardé parce que plus très beau pas d’époque puis pas en très bon état un peu bancale usés les pieds foutues les charnières elles baillent les portes elle demandent qu’à s’ouvrir puis dedans il reste toujours un truc c’est dégouttant si si les souvenirs des autres faut bien le dire ça se dit d’autant mieux qu’on aime pas le goût des siens si si faut bien le dire puis de toute façon tout ce qu’on y trouve ne va jamais à personne Les costumes trop courts un peu juste ou alors bien trop grand si grand il était si grand l’oncle machin ou les chaussures des chaussures qu’il faut bien cirer qu’il faut nourrir du cuir qu’il faut nourrir et qu’on voit bien qu’elles ont bien eu faim et qu’elles n’ont plus faim il n’y a qu’à voir la gueule des lacets des lacets qu’on peut même pas défaire les boucles sans qu’ils se cassent qu’est-ce qu’on pourrait faire de pareilles chaussures autant les laisser dans leur boîtes les jeter avec leur boîte en espérant que ne seront pas jetés d’un côté les chaussures et de l’autre la boîtes sans les chaussures mais avec quoi avec quoi Avec un peu de chance un une plus nostalgique sortira tout le linge lavera tout le linge au cas où puis ce serait dommage on sait jamais ça peut servir c ’est vrai ça peut servir on sait jamais les souvenirs Avec un peu de chance le fils du frère pas le plus jeune non l’aîné oui il est grand pour son âge et costaud oui et oui donc avec un peu de chance il lui ira à lui le costume de tonton machin on sait jamais on sait pas alors au cas où On sait jamais et ça sert à ça les souvenirs à au cas où Ça sert à ça les armoires à glaces le jour des armoires à glaces et ils viennent toujours qu’on le veuille ou non Le jour des armoires à glaces Celui des habits des printemps des étés des automnes des hivers c’est du pluriel les souvenirs Habits de circonstances Chaussures de circonstances Cravates selon c’est plus rare de circonstances et souvent pas défaite parce qu’on saurait pas refaire le noeud alors on est bien content de le retrouver Bien ou mal fait mais de le retrouver Souvenir en cravate Le jour des armoires à glaces il y aura du monde C’est comme ça Et ceux qui ne viendront pas ne le verrons pas Dos tournés peut-être A l’armoire Aux glaces Auront beau courir Les souvenirs les reflets Ils auront beau courir Les regarderont s’éloigner et si loin si discrets qu’ils soient qu’ils veuillent être sur les étagères du temps dans les plis du linge dans les boîtes à chaussures surtout celles sans chaussures Les regarderons revenir De plus en plus grands De plus en plus présents les souvenirs Trop grands pour les miroirs Trop vieux Il y a toujours un jour des armoires à glaces

La ville est tissée De fils qui se croisent Sur des chemins d’aiguilles Dans le chas de silhouettes Se hérissent des brins Que deux doigts humides Parviennent à raisonner Plus loin Juste assez pour se retourner Le fil traîne et tremble Les pas, toujours Les aiguilles encore Le temps et la distance Ont changé le motif La vie aura laissé Un tissu de souvenirs D’émotions rapiécées Il faudra D’un manteau chamarré Se vêtir quand même

Tremper un croissant de lune Dans le café du matin Tôt Et passer la journée au soleil Jusqu’à tard Puis dormir à la belle étoile Enlacé par la nuit

A la peine La cravache Le reculons L’échiné Courbé, plié Le regard coiffé La visière soulevée Par les regrets Les pas la peine de Les faut bien que pourtant Qu’il y aille faut y aller Le plus dur c’est y aller C’est faire rentrer La peine La cravache Le reculons L’échiné Le plié le coiffé le regard Aussi D’une main tenue La visière Posée la casquette Coiffé tout ça Ajustées les oeillères enchaîné le regard Et Petit geste encore Tourné un peu Cherché le pas De vis Pas de vis vissée la casquette Tournée encore vissée vissée Jusqu’à plus Pas plus loin Jusqu’à la butée Contre Jusqu’à buter contre jusqu’à pas plus loin pas possible pas plus loin Et peut-être Non Bien-sûr Oui De l’autre main Tirer le feutre La toile A l’arrière du crâne bien descendue La casquette Sur la peau Sur la nuque Tirée d’une main Sur les yeux De l’autre Sur la nuque Protéger des regard Protéger du froid Du tranchant de l’un du tranchant de l’autre Des journées guillotines Des journées pointées Des journées comptées Des journées gardées Verrouillées Par une main Devant Par une autre Derrière Et tant pis Tant pis Si d’avance ou après tant pis Chaque jour chaque jour appris Et Mais Jamais retenu A la chaîne les journées à la chaîne les pas Comptés Puis moins Lourds Lents Économisés Économisant Puis moins puis plus que traces Sur l’empreinte de la veille De la veille La veille Bien calé le temps Bien calée la journée Pointé Pointée Le matin le soir Pointé Pointée Pointé le corps Rivé rivés La journée le corps les mains Enchaînés A la chaîne A la chaîne les journées Et si seulement mais non Si seulement la visière si seulement le feutre D’une main vissée d’une main verrouillée Suffisait Suffisaient Mais non Toujours remontant la visière laisse Échapper les yeux le regard Ou Tombant Sur les yeux Dévoiler dévoilant La nuque Aux courants d’air Froids Aux journées Guillotines

Pourquoi tu Parce que je J’aimerais tant que nous

La solitude se tisse De liens déchirés

La vie en élastique Tension Entre deux certitudes

Je ne sortirai Que s’il ne fait pas beau Et pluie c’est tout Il ne le pensait pas Il a dit ça comme ça Réflexe d’escargot Qui l’un qui l’autre Parfois Sort de sa coquille Quand même Sans pluie Quand même Parce que peut-être Parce que des fois Parfois il arrive Qu’à l’issue à la fin D’une journée D’un moment de cette journée L’escargot s’obstine A ne pas ne plus à ne plus jamais jamais c’est fini On ne l’y prendra plus Il ne veut pas veut plus ne voudra plus jamais De dimanche soir De lundi matin Il a décidé de sortir de le faire Que lorsque que quand Il ne fera pas beau qu’il fera si mauvais Que chacun derrière Des rideaux de mains collées aux fenêtres Et des pluies de regards flottant dans la buée Dira Dira quand même On dira ce qu’on veut Ce qu’on veut des parents Mais ceux-là quand même Quand même ils exagèrent Honteux sont les parents malheureux les enfants D’envoyer à l’école à l’école d’aller Sous la pluie Dans les épaules la tête Rentre dans la coquille Et traîne les galoches S’il avait des galoches Et s’il avait des poches bien au fond les poings Il serrerait bien fort Un peu de sa colère De la tristesse à peine il en faut bien toujours mais pas en abuser Il serrerait tiendrait dans le creux de ses mains La poudre de colère prête à exploser Mais pas Il ne peut pas Desserrer le poing Déplier les doigts Escargot Pas de poches rien à faire c’est tant pis c’est tant mieux Sous la pluie la colère sous les gouttes la poudre Des bombes de cristal explosent autour de pluie Et sous les yeux la poudre D’avoir frotté les yeux Sur le sol les gouttes salées des yeux Qui tombent qui rejoignent les autres les autres De la pluie et des larmes Un filet une flaque Il sautera dedans Il sauterait dedans s’il pouvait s’il pouvait Pieds joints pieds joints Des éclaboussures jusqu’à plus pieds Jusqu’à tant d’eau que la mer la marée quelle marée quelle mer L’emporte l’emporte Coquille coquillage A l’envers l’escargot sur le dos l’escargot Gouvernail la queue Une corne à tribord une corne à bâbord De colère déposé de colère dérivant Il finira de pluire Viendra à soleiller Ils le savent les parents De l’escargot Ils savent Qu’à cet âge on part Ils l’ont fait sont partis Seulement s’il pleuvait Mais toujours sont rentrés après la pluie le soleil Rentrer

Pas besoin de Je sais que tu Je vais

Trop de force Pas assez De toute façon fragile

Je te regarde Je te nomme du regard Sans trouver les mots Et l’alphabet de notre amour S’amuse à nous faire rougir Lorsque balbutient nos lèvres

Pour l’un qui rigole l’autre sur la poule à cheval sur la poule à hue cocotte les oeufs cocottes les oeufs pas au coq bien à elle les oeufs sous son aile sous les yeux dans les yeux Et rigole l’un et bien fier l’autre à dos de poule à tire d’elle à la rigo qui tire à briser la coquille à la mère à la mer là le coquillage dans le sable sous les vagues pour l’un là la marée pour l’autre qui dix vagues plus loin et trop profond au large plus large trop large Pour l’un qui rigole l’autre étendue de mer et qui sait pas nager et qui se marre pas et qui plus à cheval sur plus de poule plus sur plus de pied de poule apprend bien à nager bien à se ménager Et l’un qui rigole l’autre qui fait la planche Et la mère sur la planche qui coupe qui tranche le pain et l’à table à table, les mains lavez-vous avant les oeufs hop là dans les assiettes hop là De l’un qui rigole la bouche pleine pleine de l’autre qui veut pas de la poule de l’oeuf pas manger il veut pas pour manger à sa faim pas ses principes ôter Et la poule dans sa cour Et le coq sur son trône bien chante bien fier bien lève la tête la crête rouge bien rouge le chant du coq bien rouge rouge est le chant du coq Fier le coq fier le père Qui la soupe slurp qui derrière la cuillère la grande devant les yeux louche des yeux qui brillent devant l’un qui rigole l’autre qui régale pas Le regard du père pour l’un qui rigole pour l’autre qui régale pas et le regard celui de la mère de dos qui sourit de dos du dos des épaules de la nuque elle sourit la mère au fourneau qui prépare qui dimanche peut-être va poule au pot sûrement et jour de fête peut-être coq au vinera De la mère qui de dos de la mère qui entend les pas de l’un de l’autre qui dans la cour rient déjà fini déjà le repas encore un peu au coin des lèvres et le père laissé sur ses coudes sur la table laissé là le sourire aussi encore au coin des lèvres et la mère encore le sourire qui glisse des épaules du dos le sourire glisse et quand au sol chlac le sourire tombera le père se lèvera le père partira à couteau plié dans une poche rangé dans l’autre l’un qui rigole l’autre qui à cheval et le dos de la mère qui sans se retourner l’embrasse du regard à ce soir à ce soir à s’asseoir et le père et les fils et la sainte mère à dîner à coucher à demi à demi chacun dans le lit feront qu’un feront un dans le lit Et de l’un qui rigole et de l’autre sur la poule

Il arrive Masqué d’un sourire sur le visage Et d’un pansement sur le coeur

Avant toi J’étais en devenir

Le pluriel des solitudes ne les effacent pas

Le vieux n’en finit pas de traverser Avec son chien Qui de la laisse tire son vieux Qui de la laisse qui de son chien tire ce qu’il peut Petits pas de vieux Petits pas le chien Le chien le vieux tranquilles Traversent On dirait bien qu’il est pas pressé Le vieux Mais que si, le chien Comme si de l’autre côté il l’avait vu avait vu l’os à ronger Mais petit pas le chien il sait bien le sent bien que aucun danger Petit pas le vieux et plus d’appétit

Accrocher les volets Et dire que c’est à cause du vent Les fermer le soir Dire que c’est à cause de la nuit

Nous étions de l’âge où nos pieds finissaient toujours par pendre dans le vide Au-dessus de gouffres Que nous nous employons à franchir Les jambes soit trop courtes Pas encore assez longues Pour toucher le sol Ou si longs, les jeux, Les rêves que toujours Nous semblions y flotter. Nous balancions nos pieds Sous la chaise Sous la table Sous des bouchées de quatre heures Poudre de chocolat sur tartine de beurre Le goût n’est seulement passé Que lorsqu’il n’a plus été possible De les balancer. Je me souviens de cette sensation Lorsque des talons je touchais Le bois sous mes fesses Et des orteils le dessous de la table C’était, je ne me l’explique pas, Comme un geste parfait Agréable Un mouvement qui m’accompagnait Pour bien le faire il fallait Légèrement se pencher en arrière Pour que les orteils atteignent Le dessous de la table Et légèrement en avant Pour glisser les pieds sous la chaise Et venir cogner les talons sous l’assise La perfection du mouvement Sertissait le moment du quatre heures Alors pouvions-nous Croquer à pleines dents Des tartines beurrées Et saupoudrées De chocolat Dans un autre rituel indispensable. L’ensemble était un tout Un moment Une île Nous partions ensuite Aussi vite que nous le permettait nos jambes Regagnant le sol A la conquête d’une autre île Sans même repousser nos chaises Nous trouverions d’autres montures D’autres lieux Où laisser pendre nos pieds Dans un autre vide Sur le transformateur Les pieds pendaient Au-dessus de deux mètres de vide Pas si haut que ça Beaucoup d’arbres escaladés Dépassaient largement cette hauteur Mais le transfo c’était autre chose Bloc de béton ronronnant Il fallait pour le gravir Se faire la courte échelle Plus tard il serait possible d’y grimper En courant vers le bloc et D’un pied prendre appui Sur la paroi rugueuse Pour jaillir vers le haut Et agripper la bordure Du bout des doigts puis Pratiquement au même moment Il fallait tirer sur les bras et Dans cet élan trouvé Entre les pieds et les bras Venir poser un genou Sur le toit plat du transfo Ainsi accroché, Pendu pratiquement, Ne restait plus qu’à finir De faire passer le reste du corps Pour cela il avait fallu courir Sauter Tirer Et accepter sur la peau Des mains et des poignets La morsure du béton Presque comme un sésame C’était accepté Pratiquement ignoré Ou bien seulement rappelé plus tard Par des blessures en guise de témoignage. Courte échelle, saut, Il fallait souffrir Un peu en tout cas Même lorsqu’assez grand pour se hisser A la seule force des bras Il fallait souffrir un peu Sinon ce n’était pas du jeudi Pas mérité Et quand la tâche devenait trop facile L’ascension sans douleur Au début un sentiment de supériorité Nous tenant debout sur le bloc Puis vite retrouvions-nous Cette habitude De laisser pendre Nos pieds dans le vide En cherchant au loin Un autre bloc Plus haut De quoi gravir De quoi s’écorcher sûrement De quoi laisser pendre nos pieds

Emparé de tristesse Coulé en larme

Je m’échoue sur une île sans rivage Sans retour Seul Sans regrets Seul et sans solitude

On est à ce moment Où les saisons s’écoulent De l’une sa fatigue De l’autre son ardeur Tendre précaution L’une qui se découvre Toujours dépose Sur l’autre son drap

C’est toujours pareil Toujours de la même manière Tu commences à l’écraser Entre le pouce et l’index Puis tu termines Bête calcinée Tu l’achèves En posant la paume et les autres doigts Sur le bord plat du cendrier métallique Tu finis de l’écraser Tu le décomposes Il y a toujours Encore Des brins de tabac qui restent à fumer Que tu aurais bien fumé Il n’y a pas de filtre Tu en perds un peu L’épaisseur des doigts Au moins Pour le tenir Voire moins Du bout des doigts Des ongles presque Jaunes les ongles les doigts la paume La fumée s’y loge Se roule dans ta main Glisse sur les lignes où se plissent ta vie C’est toujours pareil Tu écrases ton mégot L’autre bras appuyé L’avant bras posé sur la table Un peu penché Un peu voûté Si tu pouvais tu t’enroulerais Autour de ta main Du mégot Du cendrier Tu peux pas Tu regardes maintenant le pouce et l’index Vide Plus rien entre les deux Et toujours tu repousses le cendrier Et le temps Avant l’autre Tu as posé devant toi une fenêtre large Pas pour voir Pas pour regarder dehors Une fenêtre posée Pour laisser la lumière prendre la toile qui attend Plus blanche que la lumière Elle l’absorbe Jette derrière elle de l’obscurité Des doutes Tu te dresses Toujours tu te redresses Pour la prendre du bout des doigts déjà Les mêmes qui l’écraseront Tu la portes à tes lèvres Tu l’allumes toujours comme s’il y avait du vent Une main qui allume Une main qui protège Pas de vent pourtant La fenêtre est fermée et tu souffles la fumée qui s’y cogne Et glisse Et disparaît Ou parfois prenant son temps se joue de la lumière Et tourne et tourne Et toujours un moment se glisse dans l’ombre Te cherche Te trouve Sur la toile Et glisse Disparaît Te laissant Finis ta cigarette Finis ton paquet Garde la pose La lumière et le temps Te peignent avec ton ombre

Ici les champs collinent Avec pour horizon Des lèvres qui s’éloignent Le sourire labouré

Main sur la vitre Buée Traces de doigts Dehors il pleut Triste Et beau Fermer les yeux Fort Regard en flaque d’eau

Cris Brouillard Tous deux épais Au dernier moment Surgissent Des oiseaux de brume Qui plus loin Disparaissent Se posent dans le vide

Il feuille Un peu un rien il feuille Ce matin Juste assez Ce qu’il faut Le temps si sûr de lui Le temps Traîne les saisons Puis va Puis va

Les cris sont poussés Tout doux Tout doux Retenus Violemment

S’asseoir sur la page D’un théâtre de bûche Et attendre Sur le visage L’écorce d’un sourire Plissées Les lèvres A peine Passe Le souffle des mots

A la longue Les rêves Épousent Les Habitudes

Il a plu Ne pleut plus Il pleuvra Bientôt Entre temps des pas Si vite L’écho des gouttes encore Arrachées du ciel Je rentre déjà Déjà elle revient Nous nous croiserons Sans un regard Elle tombe je marche Immobile ça et là Un peu de pluie Blottie Redoute de la terre La déchirante étreinte

Haleine de brouillard Et terre de gencives Des arbres de chicots Postillonnent l’azur Pourtant Sous peu La gueule du soleil Avalera tout ça

Souvent Mes humeurs Restent suspendues Aux ailes de vampires

Un jour sur deux Et l’autre qui compte autant Tout autant que l’autre Mais c’est un autre jour Et cavalent alors L’un jour sur l’autre L’autre jour sur l’un L’un avec l’autre Ensemble Courent jusqu’à Une semaine sur deux Et l’autre qui compte autant Tout autant que l’autre Mais c’est une autre semaine Sept à sept se prennent Les jours pour des semaines Puis un mois sur deux Et l’autre qui compte autant Pas autant que l’autre Pour qui trente L’autre trente et un Et les jours les semaines Qui se demandent bien A quoi bon s’étaler s’aligner A quoi bon bien compter Si les mois les années Défilent sur un collier D’années qui bissextiles Une fois sur quatre Les autres qui comptent autant Toutes autant que les autres Mais ce sont d’autres années Et Peu à peu S’étreignent Jours semaines mois Les uns Les autres Qui comptent tout autant Tout autant les uns que les autres tout autant Quand à la fin s’épousent Les jours les semaines les mois les années Et donnent naissance à la dernière seconde

Aujourd’hui Le quartier de mon enfance Se franchit plus vite Traînent cependant mes souvenirs

Ton pull sans tes épaules Au cintre de mon regard Sèche Et mon amour Humide de ton absence

Dans ses yeux Le passage Immobile D’une lagune de tristesse A l’issue salée

Je retrouve mon chemin J’étais alors capable Dans une larme de m’asseoir Maîtresse d’émotion à l’ivresse salée Je n’étais ni de peine ni de plaisir Seulement d’émotion

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